Soyez des parents équilibrés

Ecrit par Jeremy Favreau

J’ai trois garçons de 1 à 5 ans et je veux qu’ils réussissent dans la vie. Je veux qu’à mon âge ils me dépassent et qu’ils soient enracinés dans tout ce qui fait un homme de valeur : des convictions solides, un cœur tendre et un esprit persévérant. Encore plus, je veux que l’évangile de notre Seigneur et Sauveur imprègne chacune de leurs pensées et actions.

Mais comment atteindre ce but ?

Ma première réaction est souvent de resserrer la discipline aussitôt que je vois l’un ou l’autre de mes garçons faire fausse route (oh les égarements des gamins de 3 et 5 ans !). À d’autres moments, j’adopte l’approche opposée. Je veux tellement éviter de brimer leurs esprits que j’hésite même à appliquer les conséquences que je sais essentielles à leur croissance.

Je sais que la bonne approche éducative doit se trouver quelque part entre ces deux extrêmes, sans que cela ne mine ni la discipline ni la tendresse. De la même manière que Dieu est envers nous maître et père, juge et ami intime, je désire guider mes enfants vers la maturité en maintenant la bonne tension entre ces deux pôles à la fois dangereux et essentiels.

L’apôtre Paul nous montre, dans l’épître aux Philippiens, comment trouver le juste milieu entre la moralité imposée et la liberté débridée. Sa façon d’enseigner révèle trois principes qui s’appliquent bien à une approche parentale équilibrée. Voyons son approche de plus près.

Éduquer, inspirer, accompagner

ÉDUQUER

L’exemple de Paul

Paul a fondé l’église de Philippes, qui était une colonie romaine en Macédoine (aujourd’hui la Grèce). Il a dû éduquer ces nouveaux croyants dans la foi à partir du moment de leur « nouvelle naissance » (cela ne ressemble-t-il pas à la tâche des parents ?). Lors de son séjour initial, ces premiers croyants ne connaissaient rien de Jésus et très possiblement rien de l’Ancien Testament non plus. Paul a donc dû leur présenter l’évangile de manière claire et complète, fort probablement selon les grandes lignes de ce que nous retrouvons dans l’épître aux Romains. Il a donné une bonne base aux nouveaux disciples pour qu’ils puissent grandir dans leur foi et comprendre la manière de vivre correspondante à leur nouvelle identité en Christ.

Il n’a pas laissé au hasard la croissance de ces nouveaux croyants. Il leur a enseigné les vertus à incarner et les vices à éviter, tout en leur communicant la différence cruciale entre la moralité et la grâce de Dieu à l’œuvre au moyen de la foi (Philippiens 3.1-12). Comme tout bon « père spirituel », il a pris en charge leur éducation comme une tâche de première importance.

La mise en pratique pour les parents

Pour les parents, c’est la même chose. Nous ne devons pas avoir peur de donner des directives, d’établir des limites, de corriger les erreurs et de déclarer certaines choses bonnes et d’autres mauvaises. Sans cela, nos enfants ne seront pas en mesure de faire de bons choix dans la vie. Ils grandiront alors sans colonne vertébrale, dont ils ont pourtant besoin pour tenir droit face aux vents adverses que nous ne pourrons pas leur éviter.

Dieu ne nous laisse pas dans le noir quant à ce qui est bon pour nous et ce à quoi Il s’attend de notre part. Du début à la fin de la Bible et de Moïse en passant par Jésus, nous retrouvons les commandements qui mènent à la vie. Ils constituent une fondation essentielle à toute vie heureuse. Mais seuls, les commandements mènent au désespoir, à la rigidité, à l’intolérance et à l’orgueil. Comme chez les pharisiens, l’éducation seule n’aide pas à reconnaître Jésus, puisqu’Il est beaucoup plus qu’un simple enseignant moral. Et notre désir pour nos enfants n’est pas simplement qu’ils soient moraux, mais surtout qu’ils aiment Jésus et désirent le suivre de tout leur cœur.

INSPIRER

L’exemple de Paul

Paul a aussi démontré aux chrétiens de Philippes comment pratiquer leur foi par sa propre conduite. Il leur dit : « Suivez tous mon exemple, frères, et observez comment se conduisent ceux qui vivent selon le modèle que vous trouvez en nous » (Phil. 3.17). Il leur modèle bien plus que des actes à imiter ; il leur partage l’attitude à adopter. Paul cherche à inspirer les disciples en leur partageant la passion qui l’anime dans sa poursuite quotidienne de Jésus Christ. Il a choisi de « tout perdre… pour gagner Christ », ce qui inclut sa justice fondée sur ses propres œuvres (3.8). Animé d’un amour ardent pour son Sauveur, il poursuit sa course avec abandon.

Et bien que Paul invite les Philippiens à suivre son exemple, cela ne veut pas dire qu’il se considère déjà comme arrivé à destination ; il les invite simplement à le rejoindre sur son parcours : « … je n’estime pas avoir saisi le prix. Mais je fais une seule chose : oubliant ce qui est derrière moi, et tendant toute mon énergie vers ce qui est devant moi, je poursuis ma course vers le but pour remporter le prix attaché à l’appel que Dieu nous a adressé du haut du ciel dans l’union avec Jésus-Christ » (3.13-14).

Tout en étant réaliste par rapport au coût de suivre Jésus, Paul encourage ces disciples à suivre son exemple de vie totalement engagée. Il les invite à faire des choses difficiles au nom de Christ, car il sait que c’est en faisant ces choses que leur amour pour Lui va grandir et leur attachement à Lui va s’affermir. Il fait appel à leurs émotions et à leur volonté en les appelant à lever les yeux vers un but inspirant et élevé.

La mise en pratique pour les parents

Selon l’auteur Ray Johnston, les parents doivent maintenir en équilibre direction et motivation, afin que les enfants grandissent avec la connaissance de ce qui est bien, mais aussi le désir de faire ce qui est bien. À mesure que les enfants grandissent vers l’adolescence, le temps et l’énergie que nous investissons dans la direction doivent se transférer petit à petit vers la motivation.

Comme Paul, il faut chercher à inspirer l’amour pour Jésus ainsi que la passion pour l’évangile et l’expansion de son royaume sur terre. Et bien sûr, il ne faut pas juste en parler. Rien n’inspire moins que la théorie ! Si nous sommes incapables de dire comme Paul, « suivez mon exemple », il est temps que nous changions notre façon de vivre. Et pour ce faire, il faudra peut-être tout d’abord changer notre façon de penser.

S’impliquer dans « le ministère chrétien » est sans doute très méritoire. Mais la bonne nouvelle c’est que toutes choses sont appelées à être renouvelées en Christ et offrent donc l’occasion de Le voir à l’œuvre. Demandez à votre enfant ce qui l’inspire et observez ses tendances et ses intérêts. Déterminez ensemble comment vous pouvez faire une différence dans votre quartier ou dans un pays étranger, et soyez prêts à prendre un risque par amour pour Jésus et par amour pour votre prochain. Puis franchissez les fossés intergénérationnels et invitez vos enfants à participer avec vous dans les activités qui vous inspirent. Montrez-leur à quoi ressemble une vie passionnée et bien investie.

ACCOMPAGNER

L’exemple de Paul

Paul met la barre haute quant à notre appel à l’union avec Christ. Il exhorte les Philippiens à s’y dévouer de tout leur être. Il déclare que pour « nous tous qui sommes spirituellement adultes, c’est cette pensée qui doit nous diriger » ; mais il sait aussi que tous ses lecteurs n’en sont pas là et il fait alors une remarque franchement surprenante : « Et si, sur un point quelconque, vous pensez différemment, Dieu vous éclairera aussi là-dessus. Seulement, au point où nous sommes parvenus, continuons à marcher ensemble dans la même direction. » (Phil. 3.15-16)

L’apôtre sait que les croyants de Philippes n’obéissent pas et ne poursuivent pas encore Christ selon le standard qu’il souhaite, mais il ne perçoit pas cela comme de la rébellion ou une erreur irréparable de leur part. Au lieu de cela, il les confie à Dieu qui, selon lui, est en mesure de les mener là où ils ont besoin d’être. On peut quasiment l’entendre dire avec un léger soupir : « Bref, Dieu vous montrera ce qu’il en est en temps et lieu. »

De plus, Paul s’associe à ces disciples immatures. Il n’exige pas de leur part la perfection et il ne les menace pas de châtiments s’ils ne s’accordent pas avec lui au plus vite. Il les invite à une communion intime et déclare qu’il va marcher avec eux quoi qu’il en soit. Ils ont donc tout intérêt à marcher avec lui.

La mise en pratique pour les parents

« Votre Père est plein de bonté. Soyez donc bons comme Lui » (Luc 6.36). Il est parfois difficile pour nous « d’être bons » envers les enfants qui nous sont confiés. Cette réticence à la bonté provient de notre conception de Dieu, que nous percevons comme dur et implacable, et en même temps l’exemple suprême d’autorité. Mais Jésus nous dit clairement que Dieu n’est pas comme ça. Dieu est patient et lent à la colère. Il est aussi celui qui « fait luire son soleil sur les méchants aussi bien que sur les bons, et il accorde sa pluie à ceux qui sont justes comme aux injustes » (Mat. 5.45). Nous pouvons être bons sans avoir peur de mal représenter Dieu à nos enfants dans notre rôle de parents.

Que nous en soyons à un stade où nous sommes fiers de nos enfants, ou bien profondément déçus de leurs attitudes et choix, notre réaction à leur égard doit être la même : leur rester fidèle et accessible, toujours prêts à écouter leurs soucis et à répondre à leurs appels. Comme Dieu le fait avec nous, il nous faut les accompagner sur le chemin de la maturité, qu’ils se trouvent sur un sommet ou dans une vallée.

Le juste milieu entre la sévérité et la permissivité ne se trouve que là où l’éducation, l’inspiration et l’accompagnement sont présents. Là où l’une ou l’autre de ces composantes manque à l’appel, on retrouve inévitablement des parents aux tendances tyranniques ou laxistes. Que Dieu nous accorde d’éviter ces extrêmes et qu’Il nous aide à cultiver des foyers où grandissent des enfants enracinés dans tout ce qui porte à leur croissance.

Jeremy Favreau est auteur et leader créatif chez Pouvoir de Changer – Étudiants. Passionné des grandes questions, il est toujours prêt à dialoguer sur l’évangile, la culture et leurs innombrables points de rencontre. Lui et son épouse Selene résident à Montréal et sont parents de trois garçons.  

Tous droits réservés © 2017 Jeremy Favreau.